Comment préserver les épaves face aux pillages, aux vers marins et aux tempêtes ?

14 novembre 2019 à 9h20 par Guillaume

TROPIQUES FM

Le capitaine est navré. L’André Malraux doit rester à quai, ce mardi. « Ce n’est pas tout de sortir, il faut aussi rentrer. Le mistral rend la manœuvre périlleuse », lance Christian Péron, commandant du bateau du Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines (Drassm). Ce mardi, le navire devait inspecter plusieurs épaves situées dans le Parc national des calanques de Marseille (Bouches-du-Rhône). Pour faire de nouveaux relevés et vérifier l’état général des navires, qui peuvent se dégrader rapidement.

« Au début de l’archéologie sous-marine, dans les années 1950, le commandant Cousteau n’avait pas mesuré à quel point les fouilles allaient détruire les sites archéologiques, explique Marine Sadania, archéologue au Drassm. Ils ont ensuite découvert que lorsque la structure en bois du navire était dégagée, dès l’année suivante, elle était complètement dégradée. » Des navires antiques qui ont survécu à plus de vingt siècles sous l’eau peuvent s’effriter en quelques mois, après leur découverte. « Le sable ou la vase préserve les épaves, reprend Marine Sadania. Le sable empêche la destruction par les courants et par les tarets, des vers xylophages. »

« On ne donne pas le point géographique exact »

C’est pour cette raison que les archéologues ré-enfouissent les épaves sous le sable entre deux plongées, en inversant le système des « suceuses », leurs aspirateurs à sédiments. Le Port de Pomègues 4, une épave du XVIIe ou XVIIIe siècle découverte au Frioul, a ainsi été ré-enterrée sous le sable, protégée par un géotextile, après la dernière campagne de fouille, en 2019. « On craint surtout les ancres et les vers marins », glisse Marine Jaouen, responsable de la fouille. Et les plongeurs curieux, ajoute le directeur adjoint du Drassm Frédéric Leroy : « Si quelqu’un se met à gratter, il peut abîmer une épave préservée depuis des siècles. Notre objectif est de donner une partie de l’information, mais souvent, on ne donne pas le point géographique exact, pour préserver le patrimoine. »

Les archéologues du ministère de la Culture tentent de préserver les épaves découvertes.

Les pillages sont « assez fréquents », selon Marine Sadania. En 2016, un pêcheur de moules qui avait pillé l’épave de la Jeanne-Elisabeth, à la Maguelone (Hérault), a été condamné à quatre ans de prison, dont deux ans ferme. Le voleur et ses quatre complices ont dû payer plus d’un million d’euros d’amende pour avoir dérobé 18.000 piastres d’argent. Pour éviter ces vols, certaines épaves sont tout simplement interdites d’accès : c’est le cas des mythiques épaves du Grand Congloué, découvertes par Cousteau.

Les mouillages et la plongée sont interdits dans cette zone du Parc national des calanques. Au total, 148 épaves (dont 17 avions) ont déjà été repérées dans le Parc. Nombre d’entre elles ne seront jamais fouillées : « On développe des outils non destructifs, parfois on ne fait qu’un sondage et pas de fouilles, même si certains de nos archéologues sont comme des lions en cage », sourit Frédéric Leroy. Surtout les jours de mistral.

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